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Parcours scolaires et construction des inégalités. Le poids de la ségrégation ethnique dans les établissements

Dans la tradition de la sociologie française des inégalités, les parcours scolaires ont essentiellement été étudiés sous l’angle des effets des caractéristiques sociales et familiales des élèves sur leurs chances de réussite. Dès le début des années 1960, le premier panel de l’INED (Girard, 1970) inaugure cette approche en changeant le regard que l’on portait sur l’école et l’enseignement. D’une institution libératrice régie par le mérite et l’effort, elle est devenue une instance de reproduction des inégalités sociales et culturelles (Bourdieu et Passeron, 1964). L’approche longitudinale a donc produit une sorte de «révolution copernicienne» en renversant le regard que l’on portait sur le système éducatif. Qu’en est-il aujourd’hui? Les approches longitudinales intègrent d’autres facteurs explicatifs que les seules caractéristiques individuelles pour comprendre le poids des facteurs contextuels, dans la tradition issues de la sociologie américaine des inégalités (Coleman, 1966, Jencks, 1972). On peut ainsi rendre compte d’une bonne part de la complexité des parcours scolaires en mesurant le poids respectif des facteurs individuels et contextuels dans la définition des inégalités et des opportunités.

Ces facteurs contextuels peuvent être de plusieurs ordres. L’une des manières de les construire est de considérer les caractéristiques agrégées des élèves d’un établissement ou d’une classe pour en mesurer les conséquences (les effets) sur les parcours individuels. Dans quelle mesure les phénomènes de ségrégation (sociale, scolaire, ethnique) influencent-ils les parcours de formation? Comment ces facteurs sont-ils hiérarchisés et dans quelle mesure construisent-ils les mêmes «régimes» d’inégalité?

Nous répondrons à ces quelques questions à partir de données d’enquêtes portant sur plus de 144'000 élèves scolarisés en France dans 333 établissements de l’Académie de Bordeaux. Après une présentation générale de la ségrégation ethnique, socio-économique et scolaire dans les établissements, nous aborderons a/ ses conséquences sur les parcours de formation et b/ sur la subjectivité et la citoyenneté des élèves.

Georges Felouzis
Section des Sciences de l’éducation, FAPSE
Université de Genève