Les effets ambivalents des stéréotypes liés au vieillissement chez les personnes âgées
Dans cette présentation, nous exposerons deux lignes de recherche qui se sont développées dans le cadre du programme PaVie de manière indépendante et basées sur des populations et des méthodologies différentes. Même si elles sont difficilement comparables, nous avons réuni ces deux ensembles de travaux afin de montrer que les stéréotypes liés aux personnes âgées peuvent avoir des fonctions positives et négatives sur le comportement des personnes âgées ainsi que sur les représentations qu’elles ont d’elles-mêmes.
Lorsqu’on pense aux stéréotypes concernant les personnes âgées, on s’y réfère généralement pour montrer qu’on les associe trop souvent à des croyances de type: les personnes âgées sont inutiles, seules, en mauvaise santé, voire démentes ou en tous cas diminuées dans leurs capacités intellectuelles. Ces stéréotypes ont été souvent analysés dans le cadre de recherche sur l’âgisme, c’est-à-dire l’étude des préjugés et des discriminations dont sont victimes les personnes âgées, mais leurs fonctions sur le comportement des personnes âgées elles-mêmes doit être encore mieux compris. Dans un premier temps, sur la base de travaux développés par Manuel Tettamanti sur une population âgée de 60 à 80 ans, nous présenterons des résultats qui montrent que ces stéréotypes négatifs peuvent représenter une menace pour les plus âgés sur le plan intellectuel (en particulier leur attention), et cela même dans les situations très contrôlées de laboratoire, créant ainsi une sorte de «cercle vicieux». Nos analyses montrent qu’en situation menaçante, il y a une diminution des performances chez les adultes âgés, relativement aux jeunes adultes et aux adultes âgés qui ne sont pas en situation de menace. En revanche, certaines des situations minimisant la menace conduisent à une amélioration des performances des adultes âgés. Dans un deuxième temps, sur la base des travaux réalisés dans le cadre de l’enquête longitudinale SWILSO-O, Valérie- Anne Ryser et Dario Spini, mènent des travaux concernant les effets positifs que peuvent avoir des images relativement négatives des personnes de même âge pour le maintien du bienêtre de personnes ayant dépassé les 80 ans. En effet, la plupart des octogénaires (voire nonagénaires) que nous avons suivis pendant près de 10 ans estiment en grande majorité qu’ils se portent mieux que les «gens de leur âge». L’utilisation d’un stéréotype de personnes du même âge permet ainsi à ces personnes interrogées de dire qu’elles vont relativement bien lorsqu’elles se comparent par rapport à leur santé. De plus, ces comparaisons favorables permettent de maintenir un niveau de bien-être relativement élevé. On le voit, au cours du vieillissement, les stéréotypes peuvent cacher des effets très différents et c’est bien les comparaisons à autrui, souvent basées sur des stéréotypes, qui modulent certaines de nos performances et notre sentiment de bien-être.
Valérie-Anne Ryser
Institut interdisciplinaire d’étude des trajectoires biographiques
Université de Lausanne
Manuel Tettamanti
Section de psychologie
Université de Genève