Déclin et plasticité des fonctions cognitives avec l’âge: une question de différences individuelles?
Chez l’adulte âgé, les changements cognitifs (mémoire, vitesse avec laquelle on traite de l’information, etc.) ont, depuis des décennies, été à l’origine de beaucoup de recherches en psychologie. On a également montré que le déclin cognitif variait selon les domaines. Il est le plus marqué dans des épreuves de raisonnement, de mémoire ou d’épreuves faisant appel à des contenus nouveaux (intelligence dite «fluide»); il est moins fort, voire inexistant jusqu’à un âge avancé, dans des épreuves faisant appel aux connaissances (intelligence dite «cristallisée»). Cependant, la plupart des travaux se sont centrés sur les performances moyennes, au niveau de groupes d’individus. Un certain nombre de travaux ont néanmoins démontré l’existence de larges différences entre individus, notamment des études longitudinales conduites sur une longue période. Plus récemment, on a également mis en évidence des différences d’âge dans la variabilité intra-individuelle, c’est-à-dire dans le comportement d’un même individu au travers du temps et au travers des situations. Cette variabilité a le plus souvent été interprétée comme reflétant une détérioration; elle peut cependant aussi être de nature adaptative, attestant d’une certaine plasticité.
Après un bref survol des travaux portant sur le vieillissement cognitif, nous présenterons une étude en cours, conduite chez des enfants, des jeunes adultes et des adultes âgés, dans laquelle nous nous sommes intéressés à la variabilité des réponses dans plusieurs épreuves cognitives, en particulier dans des épreuves de mémoire de travail et de vitesse de traitement de l’information. Les résultats, tout en attestant de changements avec l’âge dans les performances, en conformité avec la littérature dans le domaine, témoignent aussi de fortes différences entre les individus quant à la variabilité de leur comportement. Certains individus sont très stables dans leurs réponses, alors que d’autres présentent de fortes fluctuations d’un moment à l’autre. En conclusion de ces résultats, l’importance de la variabilité intraindividuelle pour comprendre les différences individuelles et les changements avec l’âge, et son éventuel lien avec d’autres variables, sera discutée.
Anik de Ribaupierre, Delphine Fagot, Judith Dirk
Section de psychologie, FPSE
Université de Genève